4 poèmes
Written in French by Odile Cornuz
On a vendu ses monts
Tu n’as rien à vendre. Tout à donner. Les gens se méfient quand ce n’est pas à vendre. Ah ? C’est à donner ? Du coup, ça vaut quoi – ça ne vaut rien ? Si on le donne, c’est que ça ne vaut rien. Alors tu pourrais vendre. Mais quoi ? A quel prix ? Tu n’as pas de prix. As-tu même de la valeur ? Alors tu décroches le panneau à ton cou et tu traces « à donner » et tu inscris « à vendre » et tu attends, dans le flot des passagers du temps. Certains s’arrêtent. Certains te dévisagent. Pourquoi ce n’est plus à donner ? A donner j’aurais bien voulu – mais si on sait que c’était à donner avant et qu’à présent c’est à vendre, non ! Quelle arnaque… Alors tu retournes le panneau et sur l’envers tu écris « à vendre ». Tu te replaces dans le flot du temps. Une personne dit : combien ? Tu réponds : ce que tu veux. Ah, c’est à la tête du client, pour faire monter les enchères, c’est ça ? Tu réponds que non, tu ne t’y connais pas vraiment avec les prix… Les prix de quoi ? Du… marché ? C’est comme ça qu’on dit ? Vraiment, tu ne sais pas ce que tu veux, ni ce que tu vaux ! Tu es obligée d’en convenir.
*
Quelqu’un n’est plus fatigué.
Pour toi, tu l’as déjà dit, la fatigue n’existe plus. Elle n’est plus à prendre en considération. C’est une donnée négligeable, un plus petit dénominateur commun. Nous sommes humains. Nous sommes fatigués. Tout le monde le sait. Pas la peine de le répéter. On saute dessus à pieds joints (notre humanité, notre fatigue) pour voir ce qui se trouve au-delà, lorsqu’on s’y soustrait. Qu’est-ce qui surnage ? Beaucoup d’incertitude ; comme quand on arrête de parler du temps qu’il fait à chaque fois qu’on ne sait pas quoi dire. Ça fait des blancs dans la parole, des trous, des silences, des envies d’étrangler ceux qui disent un ange passe – parce que les anges ne passent pas. Les anges effleurent de leurs ailes rugueuses ceux qui s’apprêtent à se lancer dans le vide. Ils suspendent le mouvement des pères sur le point d’égorger leurs fils. Ils se penchent sur des épaules dans des bibliothèques. Ils sillonnent le ciel et se foutent bien de passer ou de ne pas passer près de nous quand on n’a rien à dire. Ils s’occupent de la détresse et du savoir, du sens de nos vies et de ce qui les nourrit par l’intérieur, pas de small talk.
*
L’un crie.
Que te veut-il, ce brasseur d’air ? Par quel miracle se trouve-t-il ici, t’énumérant ce qui ne va pas ? Comment a-t-il développé la résonance de sa voix ? A-t-il pris des cours de chant, d’expression orale, de vociférations diverses ? Est-il parti dans les bois avec des groupes estimant que la colère doit sortir un jour et que toute celle rentrée, retenue, macérée des années durant, peut se projeter entre les arbres ? Que dit-il enfin, celui qui hurle ainsi à ton oreille ? Que tu n’as pas assez aimé ? Que tu n’as pas assez voulu ? Que tu n’as pas assez soutenu le mouvement d’une vie, la passion d’un instant, le vrai sentiment en somme ? Que tu n’as pas assez aimé l’amour ? Que tu n’as pas tenu les chocs – alors que tu aurais dû être shockproof et waterproof et soluble aussi peut-être… Que tu n’as pas tenu tes promesses – mais quelles promesses ? En as-tu prononcées ? As-tu murmuré des mots dans l’abandon des corps, de ces mots qui sont vrais dans l’instant, pas pour l’éternité ? As-tu fait des serments ? Peut-être – mais tout cela vaut-il la peine de crier ?
*
L’autre obstacle.
Qui au milieu du chemin ? Qui se couche sur les rails du train alors que le train c’est toi ? Qui saute sur ses pieds dans le bistrot alors que tu te diriges vers la porte ? Qui t’interrompt par un téléphone, un message, une interjection ? Pour tous les visibles, c’est facile, tu sais te défendre, tu es une grande fille. Tu peux articuler : ôte-toi de mon soleil, bouge de là, dégage. Tu peux dire non. Pas le temps. Pas pour toi. Pas comme ça. Pour les invisibles ça se corse. Tous ceux qui s’invitent dans ta tête à ton insu. Ceux qui se vautrent dans tes idées. Ceux qui font les cent pas sur ta colonne vertébrale en claquant des talons comme s’ils descendaient des névés.
Published September 1, 2017
© Odile Cornuz
Hat seine Berge verkauft.
Du hast nichts zu verkaufen. Alles bloss zu verschenken. Die Leute sind misstrauisch, wenn es nicht zu verkaufen ist. Ach, zu verschenken ist das? Was kann es dann wert sein – ist es nichts wert? Wenn man‘s verschenkt, dann ist es nichts wert. Dann verkauf doch. Aber was? Und zu welchem Preis? Du hast keinen Preis. Hast du überhaupt einen Wert? Also nimmst du das Schild vom Hals, und du streichst „Zu Verschenken“, schreibst „Zu Verkaufen“ und du wartest, im Strom der mit der Zeit Reisenden. Einige halten. Einige starren dich an. Warum nicht mehr zu verschenken? Geschenkt hätte ich es gern genommen – aber wenn man weiss, dass es mal zu verschenken war, und jetzt zu verkaufen. Nein! Was für eine Abzockerei… Also drehst du die Tafel um und schreibst auf die Rückseite „Zu Verkaufen.“ Stellst dich zurück in den Strom der Zeit. Jemand sagt: Wie viel? Du antwortest: So viel, wie du willst. Ach, ganz nach Belieben des Kunden, um die Preise zu steigern, oder wie? Du sagst, Nein, und dass du dich nicht wirklich auskennst mit den Preisen… Was für Preise? … Marktpreise? So sagt man ja wohl. Du weisst wirklich nicht, was du willst, was du wert bist. Das musst du zugeben.
*
Jemand ist nicht mehr müde.
Für dich, das hast du schon gesagt, existiert die Müdigkeit nicht mehr. Sie ist nicht mehr zu berücksichtigen. Eine zu vernachlässigende Grösse, ein kleinster gemeinsamer Nenner. Wir sind menschlich. Wir sind müde. Jeder weiss das. Lohnt sich nicht, das zu wiederholen. Man springt mit beiden Füssen darüber (unsere Menschlichkeit, unsere Müdigkeit), um zu sehen, was kommt, wenn man sich ihr entzieht. Was schwimmt dann oben? Grosse Unsicherheit; wie wenn man, sobald man aufhört vom Wetter zu reden, jedes Mal nicht mehr weiss, was man sagen soll. Es macht Leerzeichen in die Rede, Löcher, Pausen und Lust, die zu erdrosseln, die sagen: Ein Engel geht durch den Raum – weil Engel nicht durch die Räume gehen. Sie streichen mit ihren struppigen Flügeln über die, die im Begriff sind, sich in die Leere zu stürzen. Sie zögern die Bewegung der Väter hinaus, die kurz davor stehen, ihre Söhne zu schlachten. Sie beugen sich über Schultern in Bibliotheken. Sie ziehen am Himmel ihre Bahnen und es ist ihnen scheissegal, ob sie neben uns durchs Zimmer gehen, wenn wir grad nichts zu sagen haben, oder nicht. Sie kümmern sich um die Not und die Weisheit, den Sinn unserer Leben und das, was sie von Innen versorgt, nicht um small talk.
*
Der eine schreit.
Was will er von dir, dieser Heissluftverbreiter? Welches Wunder hat ihn hierher geführt, wo er dir aufzählt, was alles nicht geht. Wie hat er die Resonanz seiner Stimme gestärkt? Hat er Gesangsstunden genommen, Kurse in mündlichem Ausdruck, in verschiedenen Schreiweisen? Ist er in den Wald gegangen, in Gruppen, weil er dachte, die Wut müsse einmal heraus, und all das jahrelang Unterdrückte, Zurückgehaltene, Gegorene liesse sich zwischen die Bäume werfen? Und was sagt er nun endlich, der dir derart ins Ohr brüllt. Dass du nicht genug geliebt hast? Dass du nicht genug gewollt hast? Dass du nicht genug mit den Bewegungen des Lebens mitgegangen bist, mit der Leidenschaft des Moments, kurzum mit dem wahren Gefühl. Dass du die Liebe nicht genug geliebt hast. Dass du die Erschütterungen nicht ausgehalten hast – du hättest shock-resistant sein sollen, waterproof und vielleicht auch noch wasserlöslich. Dass du deine Versprechen nicht gehalten hast – aber welche Versprechen denn? Hast du welche formuliert? Hast du in physischer Hingabe Worte gemurmelt, Worte, die zwar im Moment wahr sind, aber nicht für die Ewigkeit? Hast du Eide geschworen? Vielleicht – aber muss man deshalb gleich schreien?
*
Der andere hindernisst.
Wer da, inmitten des Weges? Wer legt sich hin auf die Schienen, wenn du der Zug bist. Wer springt auf die Füsse, im Bistro, wenn du dich gerade zum Ausgang begibst? Wer unterbricht dich durch ein Telefonat, eine Nachricht, einen Zwischenruf. Den Sichtbaren gegenüber ist es einfach, du kannst dich verteidigen, du bist ein grosses Mädchen. Du kannst das aussprechen: Geh mir aus der Sonne, geh weg da, verpiss dich. Du kannst nein sagen. Nicht jetzt. Nicht für dich. Nicht so. Bei den Unsichtbaren wird es heikel. All die, die uneingeladen und ohne dein Wissen in deinem Kopf auftauchen. Die sich in deinen Ideen herumfläzen. Die auf und abgehen auf deiner Wirbelsäule, mit den Fersen zuerst, als ob sie auf Firnen hinabsteigen würden.
Published September 1, 2017
© Odile Cornuz
© Ulrike Ulrich
Hanno venduto i suoi monti
Tu non hai nulla in vendita. Tutto è in dono. La gente è diffidente quando nulla è in vendita. Eh? È in regalo? Di colpo, vale la pena – non vale nulla? Se è in dono, non vale nulla. Allora potresti mettere in vendita. Ma cosa? A che prezzo? Tu non hai un prezzo. Almeno hai un valore? Allora ti stacchi il cartellino dal collo e cancelli «in dono» e scrivi «in vendita» e aspetti, nella marea dei passeggeri del tempo. Alcuni si fermano. Alcuni ti fissano. Come mai non è più in regalo? In regalo lo avrei preso volentieri – ma sapendo che prima era in regalo e ora è in vendita, no! Che truffa…Allora giri il cartellino e dietro scrivi «in vendita». Ti rimetti nel flusso del tempo. Una persona chiede: quanto? Tu rispondi: quello che vuoi. Ah, è a discrezione del cliente, per aumentare l’offerta, è così? Tu rispondi di no, tu non ti intendi di prezzi… I prezzi di cosa? Del… mercato? È così che si dice? Veramente, tu non sai quello vuoi, né ciò che vali. Sei obbligato ad ammetterlo.
*
Qualcuno non è più stanco.
Per te, lo hai già detto, la fatica non esiste più. Non è più da prendere in considerazione. È un fatto insignificante, un più piccolo denominatore comune. Noi siamo umani. Noi siamo stanchi. Tutti lo sanno. Non vale la pena ripeterlo. Si salta al di sopra a piedi uniti (nostra umanità, nostra fatica) per vedere ciò che si trova al di là mentre ne siamo sottratti. Cosa emerge? Molta incertezza; come quando si finisce per parlare del tempo che è stato ogni volta che non si sa cosa dire. C’è del bianco nella parola, del vuoto, dei silenzi, il desiderio di strangolare chi dice che passa un angelo – perché gli angeli non passano. Gli angeli sfiorano con le loro ali ruvide chi si appresta a lanciarsi nel vuoto. Sospendono il movimento dei padri sul punto di sgozzare i figli. Rivolgono l’attenzione alle spalle nelle biblioteche. Percorrono avanti e indietro il cielo e se ne fregano di passare o di non passare accanto a noi quando non abbiamo niente da dire. Si occupano del dolore e del sapere, del senso delle nostre vite e di chi le nutre dall’interno, niente small talk.
*
Quello grida
Cosa vuole da te, questo venditore d’aria? Per quale miracolo si trova qui a elencare tutto ciò che non va? Come ha sviluppato questa risonanza nella voce? Ha fatto corsi di canto, di espressione orale, di vociferazioni varie? È andato nei boschi, con dei gruppi, pensando che la rabbia debba uscire un giorno e che tutto ciò che è stato oppresso, trattenuto, immerso durante gli anni, possa essere scagliato dentro gli alberi? Cosa dice, infine, colui che grida in questo modo al tuo orecchio? Che non hai amato abbastanza? Che non hai desiderato abbastanza? Che non hai sostenuto abbastanza il movimento di una vita, la passione di un istante, insomma il vero sentimento? Che non hai amato abbastanza l’amore? Che non hai retto gli urti – mentre avresti dovuto essere shockproof e waterproof e anche solubile forse… Che non hai mantenuto le promesse – ma quali promesse? Ne hai pronunciate? Hai sussurrato parole nell’abbandono dei corpi, di quelle parole che sono vere al momento ma non nell’eternità? Hai fatto dei giuramenti? Forse – ma per questo vale la pena gridare?
*
L’altro ostacolo.
Chi nel mezzo della strada? Chi si sdraia sui binari del treno quando il treno sei tu? Chi salta in piedi dentro il bar mentre vai verso la porta? Chi ti interrompe per una telefonata, un messaggio, un’interiezione? Per tutti i visibili è facile, tu ti sai difendere, tu sei una ragazza alta. Tu puoi articolare: spostati dal mio sole, togliti di là, sparisci. Puoi dire no. Non c’è tempo. Non per te. Non così. Per gli invisibili è più difficile. Tutti quelli che si invitano nella tua testa, senza che tu lo sappia. Tutti quelli che rotolano tra le tue idee. Quelli che camminano lungo la tua colonna vertebrale premendo i talloni a fondo come se scendessero lungo un ghiacciaio.
Poesie tradotte con la supervisione di Annalisa Carlevaro
Published September 1, 2017
© Odile Cornuz
© Laura Accerboni
Other
Languages
Poets the world over have always translated the work of fellow poets, even without knowing a single word of the language they were translating from. This situation, more relevant for poetry than any other genre, is widespread throughout the world.
In an ideal scenario, the translator works with an interlinear translation that combines a literal translation (mot-à-mot) with a series of notes about the form, tone, style, cultural references and so on. Otherwise, one would use a third, known language to translate from. Whatever the case, the source poet and the translator poet do share a language: the language of poetry.
Babel has been promoting this way of translating, less common in Western Europe, with several projects. The most prominent resulted in two mirrored anthologies, one, Il vetro è sottile, published in Switzerland by Edizioni Casagrande, and the other, Szyby są cienkie, in Poland by Biuro Literackie, where young Swiss Italian and Polish poets translated each other. The outcome has been brilliant and the books keep circulating widely.
Considering that Swiss poets from the country’s different linguistic regions don’t really know each other’s work, in 2016 Babel Festival got the project Poethreesome under way, by inviting Odile Cornuz, Laura Accerboni and Ulrike Urlich to translate each other’s poems. The result of their joint work has been presented at Leukerbad Literature Festival in July 2016, and subsequently at Babel Festival in Bellinzona. Here is a sample.
I poeti di tutto il mondo hanno sempre tradotto altri poeti, anche senza conoscere una singola parola della lingua originale.
In uno scenario ideale, il traduttore lavora a partire da un’interlineare (una traduzione parola per parola) corredata di note che charificano la forma, il tono, lo stile, lo schema metrico e il ritmo dell’originale. In seconda istanza si può ricorrere a una traduzione in una terza lingua conosciuta sia dal poeta tradotto che da quello che traduce. In ogni caso, i due poeti condividono sempre una stessa lingua: la lingua della poesia.
Babel ha promosso questo metodo di lavoro – meno diffuso nell’Europa continentale che altrove – mediante diversi progetti: i più recenti sono due antologie a specchio, la prima, Il vetro è sottile, pubblicata in Svizzera dalle Edizioni Casagrande e l’altra, Szyby są cienkie, in Polonia da Biuro Literackie, che hanno visto poeti ticinesi e polacchi tradursi vicendevolmente.
Ora, considerando gli scarsi contatti tra i poeti svizzeri delle differenti aree linguistiche, e come le barriere mentali possono essere più granitiche di quelle fisiche, nel 2016 Babel ha lanciato il progetto Poethreesome, invitando Odile Cornuz, Laura Accerboni e Ulrike Ulrich a tradursi vicedenvolmente nelle tre lingue nazionali. I risultati del loro lavoro sono stati presentati in eventi letterari nazionali e internazionali. Eccone un esempio.
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